Le 11 septembre 2001, Kuşadası, Ouest de la Turquie
Je sirote un thé noir dans un snack à Kuşadası, une sympathique station balnéaire en Turquie. J’ai débarqué la veille avec un groupe d’amis. On a 19 ans, on vient de terminer les examens et l’objectif de ces deux semaines de vacances, c’est de faire la fête. Soudain, un serveur s’adresse à un autre sur un ton alarmé.
Lundi matin, j’ouvre un œil et décide d’aller admirer la vue par la fenêtre de ma chambre. Elle donne sur les toits de Tarabya et le
Bosphore (en se penchant fort vers la gauche). Berrak m’a confié qu’elle habitait (et donc désormais moi aussi) un quartier très envié d’Istanbul. Pour sa verdure (un parc en face de la maison), la proximité de la mer (« on ira se promener au bord de l’eau ») et l’air pur que les riches Stambouliotes venaient jadis renifler pour se refaire une santé (Tarabya signifie Thérapie).
Ce mot, je pourrais le répéter 10 fois, avec une prononciation de feu de Dieu, qu’ils ne le comprendraient toujours pas. Les Turcs et le développement durable, ça fait deux. Ou plutôt 16 millions puisqu’ils sont autant à Istanbul à n’en avoir rien à caler de l’environnement. Comme en atteste le ‘magnifique’ parc sis en face de l’appart de Berrak à Tarabya. Dur dur pour l’écolo convaincue qui milite en moi depuis plusieurs années.
Une après-midi, Berrak et moi embarquons pour une visite guidée organisée par l’Institut français d’Istanbul. Nous sommes venues pour découvrir, avec grand intérêt la commune d’Arnavutköy, paraît-il, en pleine expansion. En réalité, cette division territoriale est envahie par les ‘Toki’, espèces d’HLM épouvantables qui gâchent le paysage. En fait, les politiques (en pleines élections communales) font construire ces cages à poules pour une bouchée de pain et y entassent les plus démunis, ravis d’être logés dans des bâtiments décents.
Suivant les conseils de Florent, rencontré la veille, je me rends donc sur le précieux www.craiglist.com. Je clique Turkey>housing>rooms shared. Effectivement, le site pullule d’annonces pour des chambres! Etudiants ou travailleurs cherchant à partager un loyer, il y a tout ce que je cherche. Quant au quartier, voyons voir : Beşiktas, bof, Nişantası nan, Sariyer trop loin, Taksim ouais, Galata ha ha ! oui.
Me voilà embarquée, à la tombée de la nuit, dans des ruelles truffées de bouquinistes. Au sommet des montagnes de livres poussiéreux, des chats somnolent. Parmi une pile, entre un roman allemand et un conte turc, Ibrahim finit par trouver la perle rare: un dictionnaire bilingue turc-français à 3 lires seulement. En sortant de chez le libraire, il me demande si je suis tentée de flâner dans d’autres quartiers. Je le suis. Je ne sais pas encore qu’il m’embarque carrément pour un vrai citytrip à Istanbul!
Je me fais une raison : une colocation propre à Istanbul, ça n’existe pas. Je suis sur le point de prendre la chambre chez la mère célibataire quand je tombe sur une nouvelle annonce pour un appartement à partager avec une Turque, un Kurde et une Italienne à CUKURCUMA, le quartier des antiquaires. Je fonce ! Il est 22h, je m’en fous, j’appelle.
Jour J, je quitte Tarabya ! Berrak, la larme à l’œil sur le perron, m’aide à embarquer ma valise dans un taxi. Direction Cukurcuma ! Ca va être bien : une chambre nickel à 3 minutes à pied de l’école, je n’en reviens pas. Ceci dit, lorsque j’arrive, non plus. Il y a comme un problème : la chambre est un bordel intégral et … sale.
Ma première impression était la bonne : Necla est folle. Mais gentille. Elle est aussi bordélique. Et manipulatrice. Elle avoue d’ailleurs en pouffant de rire: «j’ai dit que j’étais une maniaque de la propreté pour que tu prennes l’appart’». Une saloperie en somme. En turc, et puisqu’elle est prof de français, c’est elle qui me fait la traduction, ça se dit: ‘üç kağitçi’.
Serfiraz fait ses valises. Il a trouvé un foyer religieux sur le continent asiatique où il pourra même gagner un peu d’argent de poche en enseignant l’Islam aux plus jeunes. Il est content.
Necla, elle, est inquiète. Kado va lui manquer. Elle a peur de ne plus le voir. Par contre, elle ne craint pas de s’ennuyer. Ma coloc’ a des amis : la charismatique Sema, très belle et toujours vêtue de noir et le sympathique Mehmet, psychologue gay qui étudie l’homéopathie. Puis il y a sa mère qui vient lui rendre visite. Fatma a fait le hadjj, le pèlerinage à La Mecque, et depuis, elle porte le voile. Ca fait un drôle de décalage avec Necla qui se fout royalement de la religion et qui se promène guillerette sans soutien-gorge.
Ceci dit, on ne doute pas qu’elles soient de la même famille. On trouve parfois Fatma dans le lit de sa fille (en plein milieu de l’après-midi) ou au téléphone (posé sur le sol) dans une position des plus pratiques : les coudes sur le parquet et le popotin en l’air. En même temps, Fatma a le droit de faire ce qu’elle veut à Cukurcuma car cet appartement lui appartient. Sa fille vit ici à condition de lui payer un loyer. Et c’est parce que Necla a du mal à joindre les deux bouts qu’elle sous-loue toutes les pièces de son flat jusqu’à dormir dans le salon. Fatma s’en fout du moment qu’elle récupère son argent. Puis elle sait que sa fille, toute arnaqueuse qu’elle est, trouvera toujours un moyen de lui remplir les poches…
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