Grand, mince, les cheveux noirs avec une raie sur le côté, le bien-aimé de Berrak a un air de gendre parfait. Ahmet et Birsen l’aiment bien. C’est un garçon courageux et bosseur. Diplômé d’une école américaine de multimédia, il s’évertue cependant dans le commerce de téléviseurs à écran plasma (dont les prix sont affichés en euros). C’est alimentaire. Romantique aussi. S’il se tue dans un boulot qu’il n’aime pas, c’est pour être aux côtés de Berrak. Doğan est tombé instantanément amoureux de mon amie, un jour pluvieux du mois d’avril … en Belgique.
‘Ibrahim bey’ = Monsieur Ibrahim’ est mon professeur de turc. Il a les cheveux noirs de jais, de grands yeux, le teint mat. Tantôt en costume, tantôt en veste kaki trendy, mon professeur, la quarantaine, a la classe. Il entre en classe d’un pas enjoué, nous enseigne la grammaire avec le sourire et repart toujours jovial vers sa femme et ses enfants qui l’attendent pour dîner près d’Edirne, à deux heures d’Istanbul.
Je me fais une raison : une colocation propre à Istanbul, ça n’existe pas. Je suis sur le point de prendre la chambre chez la mère célibataire quand je tombe sur une nouvelle annonce pour un appartement à partager avec une Turque, un Kurde et une Italienne à CUKURCUMA, le quartier des antiquaires. Je fonce ! Il est 22h, je m’en fous, j’appelle.
Jour J, je quitte Tarabya ! Berrak, la larme à l’œil sur le perron, m’aide à embarquer ma valise dans un taxi. Direction Cukurcuma ! Ca va être bien : une chambre nickel à 3 minutes à pied de l’école, je n’en reviens pas. Ceci dit, lorsque j’arrive, non plus. Il y a comme un problème : la chambre est un bordel intégral et … sale.
Ma première impression était la bonne : Necla est folle. Mais gentille. Elle est aussi bordélique. Et manipulatrice. Elle avoue d’ailleurs en pouffant de rire: «j’ai dit que j’étais une maniaque de la propreté pour que tu prennes l’appart’». Une saloperie en somme. En turc, et puisqu’elle est prof de français, c’est elle qui me fait la traduction, ça se dit: ‘üç kağitçi’.
Serfiraz est un colocataire très discret. Je sais qu’il a 21 ans et qu’il est Kurde originaire de Van, à l’est de la Turquie. Il est étudiant en informatique et très studieux. Tous les jours, il révise pour ses examens. Sauf un soir, quelques jours après mon arrivée, où il s’agite devant la télé. C’est le décompte des votes des élections communales et mon coloc’ attend fiévreusement les résultats du DTP, le parti pro-kurde. Au cours de la visite guidée d’Arnavutköy, Berrak et moi avions rendu visite au bureau local du DTP pour connaître leur programme. Nous en étions ressorties choquées : le responsable avait avoué, à demi-mot, que son parti soutenait les terroristes du PKK. Je garde donc un œil méfiant sur ce jeune étudiant si brillant, doué en math et en chimie, qui partage le même toit que moi. D’autant plus que Serfiraz a un air de ceux qui, à force de se réprimer, finissent un jour par exploser.
Le garçon a été élevé dans un village ultra-conservateur, dans une famille ultra-traditionnelle. Sortir avec son professeur de français, de 20 ans son ainée et vivre en couple ave elle sans être marié est en complète contradiction avec les valeurs qui lui ont été inculquées. Résultat : Serfiraz est en conflit avec lui-même. Il aime Necla mais se lave de la tête aux pieds après l’amour. Il vit avec elle mais ment à ses parents qui le croient sagement dans un foyer avec d’autres étudiants de son université. Necla, elle, est toujours sur son petit nuage. Elle raconte à tout le monde que cet été, elle part en vacances à Van avec Kado et qu’il va la présenter sa famille. Son plan : se faire passer pour une jeune de 30 ans. « Je pourrais les faire, non ? » demande-t-elle en regardant son reflet dans le miroir.
Un soir, son amoureux revient avec une mauvaise nouvelle : sa famille lui a rendu une visite surprise au foyer et ses camarades de classe ont vendu la mèche…
Serfiraz fait ses valises. Il a trouvé un foyer religieux sur le continent asiatique où il pourra même gagner un peu d’argent de poche en enseignant l’Islam aux plus jeunes. Il est content.
Necla, elle, est inquiète. Kado va lui manquer. Elle a peur de ne plus le voir. Par contre, elle ne craint pas de s’ennuyer. Ma coloc’ a des amis : la charismatique Sema, très belle et toujours vêtue de noir et le sympathique Mehmet, psychologue gay qui étudie l’homéopathie. Puis il y a sa mère qui vient lui rendre visite. Fatma a fait le hadjj, le pèlerinage à La Mecque, et depuis, elle porte le voile. Ca fait un drôle de décalage avec Necla qui se fout royalement de la religion et qui se promène guillerette sans soutien-gorge.
Ceci dit, on ne doute pas qu’elles soient de la même famille. On trouve parfois Fatma dans le lit de sa fille (en plein milieu de l’après-midi) ou au téléphone (posé sur le sol) dans une position des plus pratiques : les coudes sur le parquet et le popotin en l’air. En même temps, Fatma a le droit de faire ce qu’elle veut à Cukurcuma car cet appartement lui appartient. Sa fille vit ici à condition de lui payer un loyer. Et c’est parce que Necla a du mal à joindre les deux bouts qu’elle sous-loue toutes les pièces de son flat jusqu’à dormir dans le salon. Fatma s’en fout du moment qu’elle récupère son argent. Puis elle sait que sa fille, toute arnaqueuse qu’elle est, trouvera toujours un moyen de lui remplir les poches…
Peu de temps avant mon départ, j’ai découvert www.couchsurfing.com, un site génialissime dédié aux voyageurs. Le principe ? Vous partez en voyage et vous avez envie de découvrir la ville à travers les yeux d’un local ? De généreux habitants vous font visiter gratuitement mais en prime, proposent également leur ‘couch = sofa’ pour la nuit. A mon arrivée à Istanbul, j’ai donc ‘couchsurfé’ un max (sans profiter du couch) pour faire connaissance avec la mégapole mais surtout avec ses citoyens.
C’est ainsi que j’ai rencontré Kaan, un architecte paysagiste qui ne fréquente que la haute société. Il m’a emmenée diner dans un restaurant avec une vue 360° sur tout Istanbul. J’ai fait la connaissance d’Erdem qui m’a fait découvrir Zencefil où l’on mange végétarien et bio. J’ai croisé Duygu, une fille méga enthousiaste avec qui j’ai dansé une nuit entière au Litera, un resto à l’étage avec vue sur le Palais de Topkapı. Et puis je me suis essayée au Backgammon avec Can à qui je n’avais rien à dire.
J’ai revu Florent, le Belge rencontré dans le dolmuş et on a passé une nuit à chanter des chansons en flamand après un barbecue arrosé de rakı sur le toit d’un appart à Galata. En cherchant une brique de lait de soja au supermarché, je suis tombée sur Jayda, une herboriste et aromathérapeute dont le magasin est à deux pas de l’appart.
A l’école, j’ai étudié en compagnie d’Arifan, Indonésien, de Ahmed, Somalien, de Recail, Macédonien, de Melike et Kataryna, Ukrainiennes et de deux Japonaises comiques dont j’ai oublié le nom. Dans les couloirs, entre deux cours, j’ai sympathisé avec Mohamed, Syrien et un drôle de Kossovar supporter fanatique de l’équipe de Galatasaray.
Dans un bar branché de Tünel, avec Julie et Valérie, on a fait la connaissance du serviable Serkan, employé d’une boîte de pub qui m’a ensuite présenté Kerem, motard chez BMW. Au même endroit, j’ai fait la connaissance du sympathique Tuncay, ingénieur mécanicien. Impossible de citer toutes les rencontres faites jusque là, il y en a à la pelle. Et tout cela, en seulement deux mois.
Un soir d’avril, alors que je sors boire un verre à Taksim, je trouve une fille dans le hall d’entrée. D’emblée, en la voyant, je me dis : « tiens, une fille comme moi ! » Elle me dit avec un gentil sourire : « Ah, alors c’est toi Melody. Moi c’est Manolya. On aura le temps de parler plus tard. J’emménage demain. » Ca, c’est du Necla tout craché. Elle a pris une nouvelle colocataire sans nous en parler. Mais où va-t-elle la faire dormir ? Ma coloc’ a convaincu la nouvelle de partager le living avec elle contre 300 lires (150 euro), soit la moitié du prix des chambres. Cela semble convenir à la nouvelle qui, fauchée, désespérait de ne pas trouver un toit.
Le lendemain, la petite brune débarque avec 2 valises et 3 sacs à dos remplis de ses affaires. Si elle est si chargée, c’est parce que ça fait déjà 7 mois qu’elle vit à Istanbul. Elle a 29 ans, est mi-Française mi-Turque et est étudiante en Arts à Strasbourg. Elle est venue en Turquie faire un stage de bijouterie pour apprendre les techniques ottomanes. Elle me montre son book et ses réalisations. « Magnifique ! » Je la regarde et lui souris. Manolya deviendra l’une de mes plus proches amies en Turquie.
Pour moi, c’est un fait : les Turques sont belles.
D’abord parce qu’elles ont des cheveux magnifiques. La majorité d’entre elles sont brunes. Pas un brun terne, comme vous, non, un chocolat, un cacao, un cappucino, … un brun qui en jette. Puis elles ont une masse, mais alors une masse… quand elles font une queue de cheval, on dirait des Barbies. Souvent, leur crinière s’achève sur quelques boucles anglaises, comme ça, l’air de rien.
Ensuite parce que le soir, quand elles sortent, les cheveux même lâchés, elles ont l’air de stars.
Une nuit, en pleine observation dans un bar branché, je partage mon incompréhension face à cette perfection capillaire à Farah. Qui se retourne et qui me dit : « mais Melo, c’est simple, avant de sortir, elles vont toutes chez le coiffeur ! »
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